Évaluation du Programme d'aide à la vie autonome

Juillet 2019
Direction générale de l’évaluation, de la mesure du rendement et de l’examen

Format PDF (264 Ko, 28 pages)

 

Table des matières

Acronymes

AADNC

Affaires autochtones et Développement du Nord Canada

SAC

Services aux Autochtones Canada

PSDMCPNI

Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits

PPEDS

Programmes et partenariats en matière d'éducation et de développement social

 

 

Résumé

L'évaluation du Programme d'aide à la vie autonome, qui a commencé au printemps 2018, visait la période allant de la fin de la dernière évaluation (2008-2009) à 2017-2018. Elle a été menée en utilisant les commentaires recueillis dans des entrevues avec 28 informateurs clés employés de Services aux Autochtones Canada (SAC) dans les différentes régions et à l'administration centrale ou représentants d'organisations non gouvernementales et autochtones, plus une série d'études de cas sur place, un examen de données administratives, le tout complété par les données d'une enquête réalisée pour l'évaluation du Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits de SAC.

On a constaté dans cette évaluation que les besoins grandissants et le nombre croissant de clients, combinés à des pressions elles aussi croissantes en matière de financement, font qu'il est de plus en plus difficile pour les Premières Nations de fournir des services en quantité suffisante. D'année en année, de 2014-2015 à 2017-2018, le Programme d'aide à la vie autonome a vu son déficit se creuser, les budgets diminuant et les dépenses augmentant. Or, les participants à cette évaluation expliquent avoir beaucoup de mal à répondre aux besoins des clients, notamment en ce qui concerne les soins de relève, et à garder les aînés dans leurs collectivités.

On souhaite fortement renforcer les capacités communautaires, mais ce n'est pas sans difficulté, surtout en matière de recrutement, de maintien en poste et de formation. Lorsque les Premières Nations sont en mesure d'absorber les frais administratifs généraux et les frais de formation, c'est généralement grâce à d'autres sources de revenus, ce qui crée des inégalités entre les collectivités disposant de sources de revenus fiables autres que le gouvernement fédéral et les autres. Les collectivités sont, en outre, confrontées à des pressions considérables, car il leur faut souvent, pour couvrir ces coûts, puiser dans les fonds normalement destinés à la prestation directe de services.

En général, l'approche actuelle du financement de programme n'est pas propice à l'autodétermination des collectivités. Elle est généralement utile pour ce qui est de fournir des services et de maintenir beaucoup de personnes dans leur collectivité, mais des améliorations sont encore possibles à cet égard.

Il est peu intéressant d'exiger des Premières Nations qu'elles harmonisent l'admissibilité et les tarifs avec ceux des provinces de référence. Tout d'abord, les Premières Nations ont des raisons de prendre en compte des normes différentes de celles de ministères provinciaux, lorsque certaines normes applicables dans les réserves sont peut-être plus pertinentes. Ensuite, obliger une Première Nation à appliquer les tarifs et les critères d'admissibilité de la province de référence, c'est partir du principe que ces critères sont appropriés et applicables dans les réserves, ce qui n'est souvent pas le cas. Les besoins sont souvent beaucoup plus grands et plus complexes dans une réserve, et d'autres questions contextuelles sont à prendre en compte, comme une absence générale de services complets et des problèmes de logement, de transport et d'infrastructure, ce qui est courant dans les réserves.

On a constaté, par ailleurs, en examinant l'efficacité et la viabilité à long terme du programme, qu'il serait plus facile d'obtenir des résultats en finançant des rénovations domiciliaires mineures et, encore plus, en finançant la construction d'établissements de soins de longue durée dans les réserves, dans la mesure du possible. En investissant dans ce type d'établissement, on aiderait les clients à rester plus longtemps chez eux et dans leur collectivité, ce qui est un des principaux objectifs du programme. Cet aspect n'étant pas du ressort du Programme d'aide à la vie autonome et relevant des programmes d'infrastructure de SAC, une collaboration serait nécessaire en la matière.

De plus, on a constaté dans cette évaluation que le Programme d'aide à la vie autonome et le Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits fonctionnent le long d'un continuum. Les distinctions entre les services sont généralement claires, mais le financement séparé des programmes à SAC est peu pratique et présente un intérêt limité. Il y a un certain chevauchement de services et un chevauchement important pour ce qui est de l'administration des services et de leur clientèle. L'intégration de ces services le long d'un continuum de soins est prometteur pour ce qui est d'une prestation de services efficace et d'économies là où elle est mise en œuvre, et elle est constamment recommandée dans les examens de ces programmes.

Par conséquent, il est recommandé que SAC :

  1. Propose, lorsque les collectivités le souhaitent, des options de financement plus souples qui couvrent la gamme de services actuellement offerts dans le cadre du Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits et du Programme d'aide à la vie autonome, y compris en travaillant en collaboration avec les collectivités qui veulent passer de formules de financement fixes à souples afin de mieux gérer les services à long terme.
  2. Mette à jour, à brève échéance, les directives de programme afin de préciser quels services peuvent bénéficier d'un financement, ensuite crée et mette en œuvre un plan de communication afin de faire part de ces directives révisées aux administrateurs autochtones du Programme d'aide à la vie autonome dans toutes les régions.
  3. Définisse une stratégie pour mesurer la demande de services actuelle et éventuelle par rapport à la capacité de les fournir, afin de mieux éclairer les orientations des politiques relativement à l'ampleur des besoins et à la couverture de différents types de services.
 

 

Réponse et plan d’action de la direction

Titre du projet : Évaluation du Programme d'aide à la vie autonome
Projet n° 1570-7/16131

1. Réponse de la direction

Cette réponse et ce plan d'action de la direction ont été préparés afin de donner suite aux recommandations découlant de l'Évaluation du Programme d'aide à la vie autonome réalisée par la Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen.

Le Programme d'aide à la vie autonome considère les constatations de l'évaluation quant à la pertinence et au rendement du programme. Plus précisément :

  • Les besoins grandissants et le nombre croissant de clients, combinés à des pressions elles aussi croissantes en matière de financement, font qu'il est de plus en plus difficile pour les Premières Nations de fournir des services en quantité suffisante;
  • Il est peu intéressant d'exiger des Premières Nations qu'elles harmonisent l'admissibilité et les tarifs avec ceux des provinces de référence;
  • Il serait plus facile d'obtenir des résultats en finançant des rénovations domiciliaires mineures et, encore plus, en finançant la construction d'établissements de soins de longue durée dans les réserves, dans la mesure du possible; et
  • L'aide à la vie autonome et les soins à domicile et en milieu communautaire fonctionnent le long d'un continuum. Les distinctions entre les services sont généralement claires, mais le financement séparé des programmes à SAC est peu pratique et présente un intérêt limité.

L'évaluation formule trois recommandations pour améliorer la conception et l'exécution du Programme d'aide à la vie autonome. Le programme les accepte toutes et le plan d'action ci‑joint mentionne des activités particulières pour les faire suivre d'effet.

Le Ministère mettra en œuvre une réponse par étapes sur trois ans et co-préparera et mettra en œuvre des améliorations stratégiques et opérationnelles au Programme d'aide à la vie autonome. Le Comité ministériel d'évaluation fera un examen annuel de cette réponse et de ce plan d'action de la direction pour en suivre les progrès et les activités.

L'approche graduelle tient compte de la complexité du programme et donne le temps de faire participer les partenaires autochtones et autres à un véritable processus d'élaboration conjointe. Cette approche aidera également à faire en sorte que toute mesure prise complète les initiatives plus générales du gouvernement du Canada (p. ex. Nouvelle relation financière, allégement du fardeau en matière de rapports), la réflexion initiale avec le Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits (PSDMCPNI) sur l'élaboration d'une stratégie de soins continus, la réponse du gouvernement du Canada au rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord intitulé « Les défis de la prestation de soins de santé dans les communautés des Premières Nations » ou les changements à des initiatives et programmes complémentaires (p. ex. le principe de Jordan, l'aide au revenu et les programmes d'infrastructure et de logement)

2. Plan d'action

Recommandations Mesures Gestionnaire responsable (titre et secteur) Dates prévues de début et de fin
1. Proposer, lorsque les collectivités le souhaitent, des options de financement plus souples qui couvrent la gamme de services actuellement offerts dans le cadre du Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits et du Programme d’aide à la vie autonome, y compris en travaillant en collaboration avec les collectivités qui veulent passer de formules de financement fixes à souples afin de mieux gérer les services à long terme. Nous sommes d’accord.
(sommes, ne sommes pas, sommes partiellement)
Sous-ministre adjoint, Secteur des programmes et des partenariats en matière d’éducation et de développement social (SPPEDS) Date de début :
Avril 2019

Le Programme d’aide à la vie autonome a déjà fait passer la plupart de ses ententes d’une année d’une formule de financement fixe à une formule souple. Cependant, nous sommes d’accord que, lorsqu’elles le souhaitent et que les évaluations générales des collectivités le permettent, on devrait faciliter le passage d’ententes de financement souples à des ententes de subvention globales de 10 ans. Nous sommes également d’accord qu’une plus grande souplesse est possible en harmonisant davantage le PSDMCPNI et le Programme d’aide à la vie autonome afin de fournir une gamme plus complète de services.

  1. À partir de l’exercice 2019-2020, le personnel régional du Programme d’aide à la vie autonome et les agents de financement régionaux travailleront en collaboration avec les collectivités afin d’en faire passer d’autres encore à des ententes de financement plus souples.
  2. En 2019-2020, le Programme d’aide à la vie autonome travaillera en collaboration avec le PSDMCPNI et les partenaires afin d’examiner les autorisations de programme, l’objectif étant de réduire les chevauchements et de repérer les lacunes qui pourraient être comblées par une définition plus claire ou plus détaillée des autorisations de chaque programme.
  3. En 2019-2020, le Programme d’aide à la vie autonome travaillera en collaboration avec le PSDMCPNI , les partenaires et les collectivités afin de définir et mettre en œuvre des options d’ententes de financement conjoint.
  4. En 2019-2020, le PSDMCPNI travaillera en collaboration avec le Programme d’aide à la vie autonome afin de définir des options pour un nouveau pouvoir de politique qui financerait un continuum de soutiens et de services sociaux et de santé dans les collectivités. Ces options seraient ensuite présentées au Comité de la haute direction du Ministère avant le quatrième trimestre de 2019-2020.
Directeur général, Direction générale de la politique sociale et des programmes Achèvemen  :
Mars 2020
* Cette mesure a également été autorisée par le Sous-ministre adjoint principal, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits
2. Mettre à jour, à brève échéance, les directives de programme afin de préciser quels services peuvent bénéficier d’un financement, ensuite créer et mettre en œuvre un plan de communication afin de faire part de ces directives révisées aux administrateurs autochtones du Programme d’aide à la vie autonome dans toutes les régions. Nous sommes d’accord.
(sommes, ne sommes pas, sommes partiellement)
Sous-ministre adjoint, SPPEDS Date de début :
Février 2019

Nous sommes d’accord avec la recommandation et reconnaissons l’importance d’une communication claire pour que les administrateurs des Premières Nations sachent quels services sont admissibles à un financement dans le cadre du programme.

  1. En 2019-2020, le Programme d’aide à la vie autonome cernera et clarifiera les aspects qui posent des problèmes d’interprétation des critères d’admissibilité, en se fondant sur l’information existante au sujet de ces lacunes et sur les indications des partenaires autochtones.
  2. En 2019-2020, le Programme d’aide à la vie autonome élaborera un plan de communication afin de transmettre aux collectivités bénéficiaires de meilleures instructions sur le programme.

Remarque : à l’avenir, les indications relatives à l’interprétation pourront être mises à jour en suivant le cycle annuel de révision des lignes directrices du programme, d’après les commentaires des collectivités bénéficiaires.

Directeur général, Direction générale de la politique sociale et des programmes Achèvement :
Mars 2020
3. Définir une stratégie pour mesurer la demande de services actuelle et éventuelle par rapport à la capacité de les fournir, afin de mieux éclairer les orientations des politiques relativement à l’ampleur des besoins et à la couverture de différents types de services. Nous sommes d’accord.
(sommes, ne sommes pas, sommes partiellement)
Sous-ministre adjoint, SPPEDS Date de début :
Avril 2019

Nous sommes d’accord avec cette recommandation et nous comptons élaborer conjointement et mettre en œuvre, sur deux ans, une stratégie de mesure qui fournira des données sur la demande actuelle de services et permettra une analyse des tendances qui pourrait être utilisée avec d’autres sources de données à l’appui de prévisions de la demande future.

Nous comptons définir un processus de mobilisation régionale en 2019-2020 et nous réviserons par la suite notre stratégie, s’il y a lieu, pour tenir compte des prochaines mesures appropriées d’après notre travail avec les Premières Nations et d’autres partenaires.

  1. D’ici la fin du deuxième trimestre de 2019-2020, le Programme d’aide à la vie autonome collaborera avec le PSDMCPNI et les partenaires afin de définir une approche de la mobilisation relativement à l’élaboration de stratégies de données et de production de rapports qui permettraient de mieux comprendre les besoins des collectivités en ce qui concerne les services communautaires et à domicile.
  2. D’ici mars 2020, la mobilisation sera terminée et un rapport présentera une stratégie des données qui pourrait comprendre l’utilisation de sources de données extérieures au programme, ainsi que des modifications à la collecte des données de programme.
  3. D’ici avril 2021, la mise en œuvre de la stratégie de données révisée sera terminée.
Directeur général, Direction générale de la politique sociale et des programmes Achèvement :
Avril 2021
* Cette mesure a également été autorisée par le Sous-ministre adjoint principal, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits
 

 

1. Introduction

L'évaluation du Programme d'aide à la vie autonome, qui a commencé au printemps 2018, visait la période allant de la fin de la dernière évaluation (2008-2009)Note de bas de page 1 à 2017-2018. Elle a été menée en utilisant les commentaires recueillis dans des entrevues avec 28 informateurs clés employés de Services aux Autochtones Canada (SAC) dans les différentes régions et à l'administration centrale ou représentants d'organisations non gouvernementales et d'organisations autochtones. De plus, cinq visites sur place dans des collectivités des Premières Nations ont eu lieu en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, en Ontario et au Québec. Les rapports des bénéficiaires relatifs au Programme d'aide à la vie autonome, ainsi que des données internes de SAC provenant des collectivités et des données financières ont été analysés. Une évaluation simultanée du Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits (PSDMCPNI) comprenait une enquête auprès de 131 directeurs de services de santé et/ou infirmières et coordonnateurs des soins communautaires et à domicile. Cette enquête incluait des questions sur le Programme d'aide à la vie autonome qui ont également été utilisées pour éclairer les constatations et les conclusions de cette évaluation. Des notes sur l'intersection entre ces programmes sont insérées dans tout ce rapport et certaines recommandations valent pour les deux.

La matrice d'évaluation figure à l'appendice A.

 

 

2. À propos de ce rapport

Ce rapport constitue une évaluation du Programme d'aide à la vie autonome, mais cette évaluation visait également à situer le programme dans le contexte plus général de la gestion communautaire des besoins en matière de soins et à voir s'il avait répondu aux besoins des clients, que ces besoins relèvent directement ou pas des modalités existantes du programme. Par conséquent, des observations sont formulées au sujet de l'expérience des collectivités et des clients dans l'ensemble et elles concernent souvent des programmes qui ne sont pas actuellement du ressort de l'aide à la vie autonome (c.-à-d. infrastructure). Les évaluateurs étaient d'avis qu'il était important d'examiner les questions du point de vue des collectivités et plus globalement depuis la perspective des programmes de SAC, plutôt que d'isoler les paramètres particuliers des modalités du Programme d'aide à la vie autonome d'éléments contextuels généraux. Donc, nombre des observations dans ce rapport ne sont pas toujours une indication que le Programme d'aide à la vie autonome lui-même ne répond pas aux besoins, mais plutôt du fait qu'il n'ait pas répondu à des besoins et que SAC doit donc examiner ses programmes dans une perspective plus générale.

 

 

3. Contexte

Le Programme d'aide à la vie autonome a été créé en 1983 en utilisant les mêmes autorisations financières que le Programme d'aide au revenu, en partant de l'idée que les personnes recourant à l'aide au revenu auraient besoin de services de soutien à domicile abordables. Le financement est accordé aux personnes admissibles vivant dans les réserves (et au Yukon), indépendamment de leur statut d'Indien et de leur âge.

L'objectif du Programme d'aide à la vie autonome est de faire en sorte que les personnes à faible revenu admissibles demeurent autonomes aussi longtemps que possible dans leurs collectivités en ayant accès à du soutien à domicile, en foyer d'accueil et dans le cadre d'établissements de soins. Ce programme fondé sur le lieu de résidence fournit un financement annuel aux Premières Nations, aux provinces et au territoire du Yukon dans le cadre d'ententes de financement négociées pour les soutiens sociaux non médicaux, ainsi que pour la formation et l'appui à la prestation des services, afin que les aînés et les personnes handicapées puissent garder une autonomie fonctionnelle dans leur collectivité.

En ce qui concerne les volets de soutien à domicile, en foyer d'accueil pour adultes et dans le cadre d'établissements de soins, les clients doivent (i) résider ordinairement dans une réserve; (ii) être évalués formellement par un service social ou un professionnel de la santé désigné utilisant les critères d'évaluation des soins reconnus par SAC comme ayant besoin d'une ou plusieurs mesures de soutien admissibles; et (iii) être incapables d'obtenir eux-mêmes ces services ou d'accéder à d'autres sources de soutien fédérales ou provinciales/territoriales, ce que confirme une évaluation couvrant l'employabilité, la composition et l'âge de la famille, et les ressources financières dont dispose le ménage.  

Les services admissibles comprennent généralement ce qui suit :

Soins à domicile : aide financière pour des services de soutien non médicaux, ce qui comprend, entre autres, le ménage, la préparation des repas, les services d'un préposé aux soins, les soins aux adultes, des repas livrés à domicile, une relève de courte durée pour les aidants et les transports non sanitaires, etc.

Soins en établissement : remboursement de certaines dépenses relatives aux soins de type I et de type II dans des établissements pour adultes désignésNote de bas de page 2.

Foyers d'accueil pour adultes : supervision et soins dans un cadre familial pour des adultes qui ne nécessitent pas de soins 24 heures sur 24, mais qui ne peuvent pas vivre seuls. Avant que les dépenses des clients en foyer d'accueil pour adultes puissent être remboursées, les bénéficiaires admissibles au financement doivent vérifier que le foyer d'accueil de l'adulte facture des indemnités journalières provinciales ou territoriales et fonctionne conformément aux lignes directrices qui régissent le permis ou l'accréditation accordés par la province ou le territoire de référence.

Initiative pour personnes handicapées : programme fondé sur des propositions qui appuie des projets destinés à améliorer la coordination et l'accessibilité de programmes existants pour personnes handicapées et de services communautaires offerts aux personnes vivant dans les réserves.

Les processus opérationnels, les procédures, l'octroi de permis et l'accréditation associés à la prestation par une Première Nation de services d'aide à la vie autonome doivent être compatibles avec les mêmes processus dans la province ou le territoire de référence. Le programme finance également la formation et le soutien à la prestation de services.

Le montant maximum de financement fourni à une collectivité bénéficiaire au cours d'une année financière est fixé dans l'entente de financement signée par ladite collectivité.

 

 

4. Constatations de l’évaluation : Incidences et résultats

4.1 Répondre aux besoins

Constatation 1. Les besoins grandissants et le nombre croissant de clients, combinés à des pressions elles aussi croissantes en matière de financement, font qu’il est de plus en plus difficile pour les Premières Nations de fournir des services en quantité suffisante.

Le résultat attendu du Programme d'aide à la vie autonome, d'après le Rapport ministériel sur les plans et les priorités de 2016-2017, est que des soutiens à domicile, en foyer de groupe et en établissement de soins sont offerts aux personnes à faible revenu qui sont dans le besoin. L'indicateur est qu'on répond aux besoins de 100 % des clients dont les besoins de services sociaux ont été évalués. Les données de 2016-2017 montrent qu'on a atteint 97 %. L'instrument de collecte des données de 2018-2019 a été modifié pour permettre aux administrateurs de signaler si un service n'a pas été fourni, afin de déterminer l'ampleur des listes d'attente et des lacunes dans la prestation de services. Cette modification correspond à ce que disent unanimement les participants autochtones à cette évaluation, à savoir que, souvent, les personnes demandant à recevoir des services n'ont pas pu bénéficier du nombre total d'heures de service ou du type approprié de soins pour lesquels elles avaient été évaluées.

Au cours des quatre dernières années, le Programme d'aide à la vie autonome a vu son déficit se creuser, les budgets diminuant quelque peu, tandis que les dépenses réelles ont nettement augmenté (voir la figure 1). Il existe une méthodologie nationale de répartition du financement, mais les bureaux régionaux de SAC jouissent d'une grande autonomie pour ce qui est de décider du calcul du montant du financement et de la façon dont il est fourni. Dans le passé, les bureaux régionaux réaffectaient les fonds à l'interne si un programme particulier se trouvait à court. Dans une ordonnance de réparation récente relative aux services à l'enfance et à la famille des Premières Nations, le Tribunal canadien des droits de la personne déclare que le Canada doit « cesser de réaffecter inutilement des fonds destinés à d'autres programmes sociaux, particulièrement aux services de logement, si cela a l'effet préjudiciable de retirer des enfants à leurs familles et communautés ou si cela produit d'autres effets négatifs ». Une décision du Secteur des programmes et des partenariats en matière d'éducation et de développement social de SAC interdit aux programmes sociaux de réaffecter des fonds à l'interne d'un programme à un autre. Les personnes interrogées estiment que cela accentue probablement les problèmes financiers auxquels les bénéficiaires font déjà face.

Pour finir, les budgets ont diminué légèrement, passant d'environ 85 millions de dollars en 2014-2015 à un peu plus de 80 millions de dollars en 2017-2018, et les dépenses réelles sont passées d'un peu moins de 100 millions à environ 117 millions de dollars. Cela montre un décalage important et croissant entre le coût estimatif annuel du programme et ce qu'il coûte réellement.

Figure 1 : Les affectations budgétaires régionales ont diminué au fil du temps, mais les dépenses réelles ont augmenté.

Figure 1 : Les affectations budgétaires  régionales ont diminué au fil du temps, mais les dépenses réelles ont augmenté
La description de la figure 1 : Les affectations budgétaires régionales ont diminué au fil du temps, mais les dépenses réelles ont augmenté

La figure montre les dépenses annuelles inscrites au budget du programme (en millions de dollars), lesquelles demeurent généralement les mêmes de 2014-2015 à 2017-2018, soit environ 82 millions de dollars par année. Les points de données sont portés au graphique aux côtés des dépenses réelles annuelles, qui augmentent de façon constante : environ 100 millions de dollars en 2014-2015, 105 millions de dollars en 2015-2016, 110 millions de dollars en 2016-2017 et 115 millions de dollars en 2017-2018.

 

Cependant, le financement pour les ententes de financement global et les volets des autres ententes de financement (soins à domicile, foyers d'accueil, prestation de service et initiative pour personnes handicapées), à l'exception des soins en établissement, n'a pas augmenté au cours de cette période. Le volet des soins en établissement a fait l'objet d'une hausse de financement de près de 37 % pendant cette période, entraînant ainsi une croissance des dépenses totales à l'échelle nationale (voir la figure 2).

Cette hausse des dépenses totales s'explique par les tendances au Manitoba, en Saskatchewan et au Yukon, où les dépenses associées aux soins en établissement (mais pas à d'autres catégories) ont considérablement augmenté, contrairement aux autres régions. En général, les dépenses pour les soins à domicile ont augmenté dans les régions de l'Alberta et de l'Atlantique, elles ont diminué en Colombie‑Britannique, et elles sont demeurées inchangées partout ailleurs. Les dépenses au titre des ententes de financement global pour l'aide à la vie autonome ont augmenté de façon notable au Québec seulement.

Figure 2 : Le financement pour la plupart des volets n'a pas changé de 2013-2014 à 2017-2018, sauf en ce qui concerne les soins en établissement, dont le financement a augmenté de 37 %.

Figure 2 : Le financement pour la plupart des volets  n'a pas changé de 2013-2014 à 2017-2018, sauf en ce qui concerne les soins en  établissement, dont le financement a augmenté de 37 %
La description de la figure 2 : Le financement pour la plupart des volets n'a pas changé de 2013-2014 à 2017-2018, sauf en ce qui concerne les soins en établissement, dont le financement a augmenté de 37 %

La figure présente les dépenses réelles pour les soins en établissement, qui passent graduellement de 35 millions de dollars à 47 millions de dollars de 2013-2014 à 2017-2018. Elle montre que les dépenses pour le financement global sont stables durant cette période (environ 34 millions de dollars par année), qu’elles demeurent généralement stables pour les soins à domicile (environ 27 millions de dollars par année), et que toutes les autres dépenses se maintiennent entre 1 et 3 millions de dollars environ au cours de cette période.

 

En bref, les niveaux de financement actuels ne permettent pas aux Premières Nations de fournir le nombre total d'heures de soins recommandé dans les évaluations. Bien que les collectivités présentent des différences en ce qui a trait aux types et aux niveaux de besoins non satisfaits de leurs membres, les besoins non satisfaits régulièrement cités sont les suivants :

  • Services d'aide à la vie autonome les fins de semaine;
  • Soutien pour des tâches en dehors du domicile, comme les transports, une aide pour faire les courses et les programmes de jour;
  • Besoins plus importants de certains clients ou de clients aux comportements difficiles dus, par exemple, à la toxicomanie ou à des lésions cérébrales;
  • Toutes les tâches pour lesquelles les clients ont besoin d'aide chez eux, à cause de limites budgétaires qui font que trop peu d'heures de service sont fournies; et
  • Financement des soins palliatifs et d'activités adaptées à la culture, y compris le recours à des guérisseurs traditionnels.

Avec le financement actuel, si une bande engage un autre administrateur, elle aura moins de fonds disponibles pour des heures de services directs aux clients. Les bandes qui ont les moyens de couvrir les frais administratifs tels que les salaires sont celles qui ont des revenus de sources propres ou qui bénéficient d'affectations importantes dans le cadre du programme de Financement du soutien des bandes.

Les administrateurs de programme des Premières Nations soulignent que des budgets très serrés empêchent de couvrir des frais administratifs tels que ceux des biens de technologie de l'information efficaces. Les dépenses de services de relève sont admissibles au titre du Programme d'aide à la vie autonome. Cependant, d'après les administrateurs de l'aide à la vie autonome, dans la plupart des cas, les collectivités n'ont pas assez de fonds pour ce type de service. Ils précisent que toute la portion des soins à domicile de l'aide à la vie autonome sert à payer des services d'aide familiale directe, comme la préparation des repas et le ménage. La plupart des collectivités ne finançaient aucune relève. Dans une collectivité, la relève était financée par des revenus de sources propres, tandis que dans d'autres, on s'attendait à ce que les familles paient la relève de leur poche. Les administrateurs de programme des Premières Nations expliquent que, faute de pouvoir financer la relève, la qualité des services dispensés baisse à cause de l'épuisement des aidants.

La relève est également un service admissible dans le PSDMCPNI de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits et a droit au financement en vertu du principe de Jordan. Il ressort de l'enquête réalisée pour l'évaluation du PSDMCPNI que 63 % des répondants font état d'une augmentation de la demande de relève à domicile au cours des cinq dernières années. Les propositions des deux premières années de financement en vertu du principe de Jordan révèlent que quatre pour cent des demandes concernent la relève. Au moment de la rédaction de ce rapport, SAC ne recueille pas de données sur les raisons qui incitent à demander un financement de la relève en vertu du principe de Jordan. On ne peut donc déduire aucun lien avec le Programme d'aide à la vie autonome.

Les conséquences des besoins non satisfaits varient d'une collectivité à l'autre, certaines mentionnant des inconvénients ou des problèmes relativement mineurs dans ces domaines, tandis que d'autres se déclarent incapables de fournir des services suffisants pour garantir que les personnes âgées vivent dans de bonnes conditions sanitaires et en sécurité (p. ex. incapables de faire la lessive régulièrement, d'assurer une préparation de repas contenant des aliments nutritifs et appropriés). Dans toutes les collectivités, si on ne peut pas satisfaire à ces besoins, c'est faute de financement suffisant pour tous les besoins évalués dans la portion des services à domicile du Programme d'aide à la vie autonome.

Il est moins probable d'avoir des besoins non satisfaits dans les services dispensés dans le cadre de soins en établissement, en grande partie parce que le financement du Programme d'aide à la vie autonome couvre intégralement l'indemnité journalière des résidents des établissements de soins de longue durée en dehors des réserves (lorsqu'une personne n'a pas les moyens de payer). Il en va autrement des soins à domicile, où la prestation d'heures de service dépend des ressources disponibles et où le client reçoit donc un nombre d'heures de service approuvé qui ne correspond pas toujours à celui pour lequel il a été évalué. 

Bien qu'un résident d'établissement de soins de longue durée financé par SAC bénéficie toujours de soins standards pour la province, on signale plusieurs problèmes se rapportant au bien-être culturel, social et psychologique liés aux soins en établissement, en particulier dans les établissements situés en dehors des réserves. Ces problèmes sont les suivants :

  • La distance séparant les résidents de leur collectivité qui entraîne souvent un isolement social et une détérioration du bien-être physique et mental;
  • Une absence de perspectives autochtones sur le bien-être psychologique et social, comme la possibilité de participer à des cérémonies traditionnelles telles que celles organisées au décès d'un proche; et
  • En l'absence d'établissement de soins dans la collectivité, beaucoup de clients (surtout âgés) devront recevoir des soins dans des établissements situés en dehors des réserves qui n'ont pas de lien culturel avec leur collectivité. Même si ce n'est pas l'intention des soins en établissement, bien des personnes interrogées font des parallèles avec les pensionnats, notamment pour les aînés qui étaient scolarisés au cœur de cette époque.

Des défis géographiques et sociaux particuliers, comme des intempéries et la pénurie de logements dans de nombreuses Premières Nations, peuvent créer des obstacles à la prestation de soins spécialisés dans des établissements situés dans les réserves (p. ex. podologues, orthophonistes et ergothérapeutes, exigés en vertu des normes provinciales en matière de délivrance de permis). Les coûts pour faire venir ces professionnels en avion une ou deux fois par mois peuvent être prohibitifs, et les formules de financement du programme ne prévoient pas ces différences entre les collectivités.

On a constaté que le traumatisme psychologique et émotionnel laissé par les pensionnats peut faire qu'une personne est moins à même de s'occuper d'un membre de la famille, ce qui veut dire que le rôle des aides familiales à domicile est peut-être particulièrement important dans les collectivités des Premières Nations dont la population est dans une large mesure touchée par le traumatisme intergénérationnel.

4.2 Capacité communautaire

Les limites de capacité des collectivités sont les plus couramment mentionnées en ce qui a trait aux ressources humaines, p. ex. les longues heures pour le personnel des bandes, l'embauche et le maintien en poste de personnel qualifié, ainsi que la mise à niveau et la formation des employés. Les administrateurs de l'aide à la vie autonome sont régulièrement confrontés à un dilemme commun : engager un autre administrateur pour alléger leur charge de travail aurait aussi pour résultat de disposer de moins de fonds pour les heures de service direct pour les clients. Partout où il en a été question, les administrateurs déclarent choisir de fournir les services aux clients. Les bandes qui ont les moyens de couvrir des frais administratifs tels que les salaires sont celles qui ont des revenus de sources propres ou qui bénéficient d'affectations importantes dans le cadre du programme de Financement du soutien des bandes.

La plupart des collectivités ont du mal à recruter et à maintenir en poste du personnel pour la prestation de services d'aide à la vie autonome. Avec le financement existant de ces services, elles ne sont pas en mesure d'offrir des salaires et des avantages sociaux concurrentiels. Le manque de logements dans les réserves ou à proximité est une autre difficulté qui s'ajoute à la question des salaires et des avantages sociaux, les employés potentiels étant obligés de payer des loyers élevés sur un marché où les logements sont rares ou de s'astreindre à de longs trajets quotidiens entre le travail et la maison. Ces défis sont également liés, dans certains cas, à une difficulté pour les collectivités à offrir des services la fin de semaine et le soir.

Les frais de formation sont également importants. L'évolution démographique continue amène certains administrateurs de programme à s'inquiéter pour la sécurité des aides ménagères, car le nombre croissant de clients imprévisibles et forts physiquement peut représenter un danger pour elles. Il serait utile qu'elles reçoivent une formation à la gestion de la santé mentale et des conflits, car la plupart des collectivités n'ont pas les ressources voulues pour envoyer deux aides chez un client, ce qui est mentionné comme étant une des seules options de protection actuelles. Lorsque les collectivités réussissent à engager et à maintenir en poste du personnel pour offrir des services au domicile des clients ou dans des établissements de soins de longue durée, la nécessité de former le personnel à s'occuper de clients spécialisés, comme ceux qui ont des problèmes de toxicomanie ou des lésions cérébrales acquises, est mentionnée. Voici quelques-uns des types de formation souhaités par les collectivités :

  • Formation à la prévention des chutes;
  • Nutrition et salubrité des aliments;
  • Comment repérer la violence et la négligence à l'égard des aînés;
  • Compétences en intervention et en désamorçage de crise;
  • Compétences nécessaires pour aider des personnes qui ont des troubles cognitifs et des problèmes de santé mentale, y compris de toxicomanie; et
  • Formation de base à la sécurité au travail.

Plusieurs administrateurs sont d'avis que la formation ne fait pas partie de l'utilisation admissible des fonds de l'aide à la vie autonome. D'autres savent qu'il s'agit de dépenses possibles, mais sont limités par les coûts. L'incapacité de financer la formation des employés, notamment des aides ménagères, accentue les difficultés à attirer et à garder du personnel, ce qui peut entraîner une hausse des frais administratifs due au roulement de personnel, et une continuité réduite dans les soins aux clients. Cela peut se révéler particulièrement important dans des collectivités ou des foyers où les aînés hésitent à laisser des étrangers entrer chez eux, et lorsqu'on travaille avec des personnes souffrant de démence. Les taux de démence augmentent au Canada : en 2011, 750 000 Canadiens souffraient de démence et ce nombre devrait doubler d'ici 2030Note de bas de page 3. Il semblerait que le taux de démence augmente encore plus vite chez les Autochtones âgés que chez les non-Autochtones âgésNote de bas de page 4.

4.3 Autodétermination

Le contrôle et l'autodétermination sont au cœur de la conversation sur la réconciliation entre le gouvernement du Canada et les Premières Nations. En bref, beaucoup de collectivités ont conclu des ententes de financement global qui font qu'elles sont plus à même de déterminer leurs propres priorités, mais la conception du Programme d'aide à la vie autonome (et de tous les programmes sociaux de SAC) perpétue une pratique qui consiste à définir et à contrôler les services des Premières Nations par les lignes directrices du programme et les modalités des subventions et des contributions. Le récent passage de l'ancien Affaires autochtones et du Nord Canada à Services aux Autochtones Canada et, parallèlement, de modalités de programme au soutien des services, peut aider à améliorer les relations entre le gouvernement du Canada et les Premières Nations.

Le Programme d'aide à la vie autonome est jugé très important. Beaucoup d'administrateurs démontrent leur attachement au bien-être des personnes en soutenant les personnes âgées au moyen de revenus de sources propres et d'autres mécanismes de financement pour compléter le financement de l'aide à la vie autonome. Maintenir les aînés dans leur collectivité est une priorité telle pour certaines qu'elles l'inscrivent dans leurs plans communautaires mêmes. Une administratrice d'une collectivité qui n'a pas d'établissement dans la réserve a raconté aux évaluateurs qu'un aîné placé dans une résidence pour personnes âgées en dehors de la réserve lui avait demandé si c'était là qu'il allait mourir.

La dynamique actuelle de SAC en tant qu'agent et bailleur de fonds de programmes et de la Première Nation en tant qu'administratrice est souvent considérée comme décalée par rapport à l'objectif de SAC, qui est de soutenir les Premières Nations sur le chemin de l'entière autodétermination. Un administrateur de l'aide à la vie autonome paraphrase ainsi les propos d'un chef : « Nous ne sommes que des agents de prestation pour le gouvernement [fédéral]. Nous ne sommes pas autonomes. Je recommande donc que nous nous intéressions aux programmes reposant sur la spécificité des Premières Nations. On ne peut tout simplement pas imposer des politiques aux Premières Nations pour qu'elles les mettent en œuvre. »

 

 

5. Constatations de l’évaluation : Incidences et résultats

5.1 Comparabilité provinciale

Constatation 2. Il est peu intéressant d’exiger des Premières Nations qu’elles harmonisent l’admissibilité et les tarifs avec ceux des provinces de référence.

Les administrateurs de l'aide à la vie autonome reconnaissent l'importance des normes provinciales de soins en établissement pour ce qui est de la sécurité des clients et pour ce qui est de garantir un certain niveau de soins, mais certains estiment qu'un financement limité les empêche de respecter les normes provinciales requises pour obtenir un permis pour leur établissement dans la réserve. Par exemple, un établissement de soins de longue durée dans une réserve au Manitoba ne peut pas obtenir de permis parce qu'il ne peut pas satisfaire à la norme provinciale qui exige la présence d'une infirmière sur place 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, à cause d'un manque de logement et de l'impossibilité d'offrir un salaire concurrentiel dans le cadre du Programme d'aide à la vie autonome.

Il est justifié d'envisager d'autres approches autres que provinciales en matière de normes et de règlements. Par exemple, deux collectivités visitées pendant les visites sur place ont des établissements accrédités par Agrément Canada. Une d'elles explique avoir préféré satisfaire à ces normes parce qu'elle estimait qu'elles étaient « supérieures aux normes provinciales » et aussi parce que cette collectivité se trouve à cheval sur plusieurs territoires administratifs, ce qui fait qu'avoir une seule norme à respecter a simplifié son approche de la qualité des soins. Il est à noter que le territoire du Yukon n'a pas de loi qui dicte des normes pour les soins en établissement et qu'il utilise donc Agrément Canada comme organisme d'agrément.

Les questions de comparabilité provinciale ne concernent pas seulement les normes, mais aussi l'application de taux et de critères d'admissibilité. Pour bénéficier de services d'aide à la vie autonome, une personne doit prouver, par une évaluation des moyens financiers, qu'elle ne peut pas obtenir de tels services sans aide financière. Certaines provinces (p. ex. la Colombie‑Britannique) ne limitent pas ces services aux personnes à faible revenu. Toute personne peut demander une évaluation de ses besoins physiques afin de recevoir des services, et le montant dû est ensuite décidé au vu d'une évaluation des moyens financiers.

D'après les administrateurs, l'évaluation des moyens financiers constitue généralement plus un obstacle administratif qu'un outil pour déterminer quelles personnes sont le plus dans le besoin, surtout si l'on sait que la plupart des personnes vivant dans les réserves ont de faibles revenus.

Depuis la création du Programme d'aide à la vie autonome en 1983, les programmes de type aide à la vie autonome des provinces et du Yukon ont beaucoup évolué. Aujourd'hui, la plupart des provinces et le Yukon visent à servir les clients dans un continuum de soins, alors que ce n'est le cas que dans une certaine mesure dans les programmes actuels de SAC. Jusqu'en 2017-2018, la méthode d'affectation régionale du financement reposait sur des estimations historiques et une petite hausse des coûts. Ces estimations historiques reposaient sur les coûts provinciaux à l'époque, mais elles présentent un intérêt limité aujourd'hui. La méthode d'affectation régionale pour l'exercice 2018-2019 a été adaptée de manière à permettre aux bureaux régionaux de prendre en compte d'autres facteurs, comme une projection du nombre prévu de clients et une hausse des coûts qui tient compte du taux d'inflation et des augmentations annuelles à l'échelle sectorielle du coût de la prestation de services de soutien social. Ces adaptations correspondent peut-être mieux à la réalité des collectivités des Premières Nations et les aident sans doute davantage dans l'exécution du programme.

Surtout, la comparabilité provinciale ne rend pas nécessairement compte à elle seule de la réalité dans les réserves et, en particulier, des besoins croissants et de leur évolution. La population autochtone du Canada devrait augmenter de 40 % entre 2006 et 2031, la majorité de ce pourcentage étant âgée de 60 ans et plus, et la proportion des personnes dans cette catégorie d'âge devrait tripler d'ici 2031Note de bas de page 5. Les Autochtones âgés de 45 à 54 ans ont une fragilité déclarée semblable à celle du groupe des 65 à 74 ans dans la population non autochtoneNote de bas de page 6. De même, dans ce groupe d'âge, 51 % des Autochtones auraient au moins trois maladies chroniques, contre 23 % dans la population non autochtoneNote de bas de page 7, et les diagnostics de démence sont en augmentation plus rapide chez les aînés autochtones. On s'attend à ce que la population autochtone ait besoin de services sociaux et de santé environ 10 ans plus tôt que la population non autochtone.

D'après une enquête menée par Goss Gilroy Inc. pour l'évaluation du PSDMCPNI de SAC, beaucoup de répondants soulignent que le vieillissement de la population constitue un changement important qui se répercute sur leur charge de travail. Les répondants reconnaissent que, si le PSDMCPNI aide la population vieillissante à être plus indépendante et à rester chez elle plus longtemps, il accroît aussi le besoin de services d'aide à la vie autonome non médicaux, comme la préparation de repas, le ménage et les transports. Dans la même enquête, de nombreux répondants expliquent que les demandes de services en général augmentent depuis cinq ans. 

Il y aura aussi, parallèlement, un besoin croissant de services de soutien en santé et de gestion de maladies chroniques à un plus jeune âge. Les diagnostics de troubles causés par l'alcoolisation fœtale et d'autisme deviennent plus fréquents chez les jeunes Autochtones. Les administrateurs de programme qui travaillent dans les collectivités signalent également une hausse des troubles du comportement et des problèmes de santé découlant de la consommation d'opioïdes. Les difficultés associées à ces diagnostics sont généralement amplifiées par d'autres déterminants de la santé tels que la pauvreté et des logements insalubres. Les Autochtones qui résident dans les réserves sont beaucoup plus susceptibles que les non-Autochtones de vivre dans un logement nécessitant des réparations importantes [43 % contre sept pour cent] et/ou surpeuplé [27 % contre quatre pour cent].

Un grand nombre de jeunes à qui on pose de plus en plus de diagnostics comportementaux et qui ont des besoins sociaux qui évoluent aussi seraient admissibles au financement pour vivre en foyer d'accueil pour adultes, dont toutes les collectivités visitées pour cette évaluation déclarent avoir beaucoup besoin. Cependant, il n'existe actuellement de foyers d'accueil pour adultes qu'au Québec, en Colombie-Britannique et au Yukon, et de façon très limitée en Alberta. Les jeunes de plus en plus nombreux à avoir des besoins intellectuels et comportementaux n'ont pas forcément besoin de foyers d'accueil à plein temps agréés par la province, mais plutôt de centres récréatifs ou de jour ou d'un accès à un personnel de soins à domicile très qualifié.

Selon leur province de résidence, les clients du Programme d'aide à la vie autonome rencontrent des obstacles ou ont droit à des avantages. Par exemple, les administrateurs des Premières Nations déclarent souvent avoir du mal à attirer du personnel pour fournir des services d'aide à la vie autonome et à le maintenir en poste, ce qui fait que, dans beaucoup de collectivités, on compte sur la famille pour fournir ces services. La politique dans certaines provinces interdit de payer un membre de la famille pour qu'il fournisse des services de soins à domicile. Il n'est donc pas surprenant que cette règle soit au détriment des clients dans les réserves, étant donné la plus grande probabilité de parenté entre les gens, et qu'elle ait pour effet de réduire le nombre de travailleurs admissibles disponibles pour la prestation de soins à domicile.

En ce qui concerne les soins en établissement, les coûts de programme varient considérablement d'une région à l'autre. Dans la moitié environ, les soins en dehors des réserves coûtent plus cher que dans les réserves. En 2015-2016, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, le Manitoba et la Saskatchewan ont déclaré des coûts des soins en établissement en dehors des réserves supérieurs à ceux dispensés dans les réserves. Inversement, au Québec et en Colombie-Britannique en tant que régions de SAC, les coûts étaient inférieurs pour les résidents d'établissements situés en dehors des réserves, tandis qu'en Ontario et en Alberta, ils étaient à peu près les mêmes.

5.2 Efficacité du programme

Liens avec l'infrastructure

Constatation 3. Il serait plus facile d’obtenir des résultats en finançant des rénovations domiciliaires mineures et, encore plus, en finançant la construction d’établissements de soins de longue durée dans les réserves, dans la mesure du possible.

Dans les collectivités qui ont participé à cette évaluation et qui n'ont pas d'établissement de soins de longue durée dans la réserve, les personnes interrogées déclarent souhaiter en construire un. Par ailleurs, les administrateurs de programme souhaitent une augmentation du financement des réparations domiciliaires mineures. Selon eux, les projets d'immobilisations mineures, comme la conversion d'une pièce du rez-de-chaussée en chambre principale ou l'installation d'une barre d'appui dans une baignoire, reviennent moins chers qu'une place dans un établissement de soins de longue durée, et ils contribueraient aussi à la réalisation du résultat du programme en permettant à une personne de rester encore plus longtemps chez elle. L'argument selon lequel le maintien au domicile est plus rentable que le placement en établissement de soins de longue durée est évident dans les données financières du Programme d'aide à la vie autonome.

En 2016-2017, le coût réel de l'aide à la vie autonome avoisinait les 111,8 millions de dollars à l'échelle nationale. Environ 40 % du financement total couvrent les soins à domicile et environ 60 % les soins en établissement. En tout, 9 600 clients reçoivent un soutien aux soins à domicile dans le cadre de l'aide à la vie autonome et 830 personnes vivent dans des établissements de soins de longue durée. Donc, le coût estimatif des soins à domicile par an et par client est de 4 658 $, tandis que le coût annuel par client résident d'un établissement de soins de longue durée est de 80 819 $.

Lorsque des besoins de travaux d'adaptation du logement sont cernés et faisables, ces travaux seraient beaucoup plus rentables que le placement d'une personne dans un établissement uniquement à cause de limites physiques à son domicile pour lesquelles on aurait pu prendre des mesures favorisant une plus grande autonomie. Il faut prendre en compte à la fois le bien‑être et l'autonomie des clients et la rentabilité globale du programme, des politiques et des approches afin que les Premières Nations soient plus à même d'offrir des travaux d'adaptation. Au lieu d'investir dans des établissements de soins de longue durée, on ferait mieux d'investir pour permettre aux clients de rester chez eux et dans leur collectivité plus longtemps, ce qui est un des principaux objectifs du programme. Comme cela ne relève pas du Programme d'aide à la vie autonome, mais des programmes d'infrastructure de SAC, une collaboration serait nécessaire à ce sujet.

Toutes les collectivités qui ont participé à cette évaluation ont pour but de maintenir les personnes dans la collectivité. Le résultat énoncé du Programme d'aide à la vie autonome appuie ce souhait, mais en pratique, les problèmes de recrutement et de maintien en poste du personnel de soins à domicile et les moyens limités pour tenir des établissements de soins de longue durée dans les réserves (permis provincial et dépenses en immobilisations) font que souvent les aînés n'ont pas d'autre choix que de quitter la collectivité. Les avantages de leur maintien dans leur propre collectivité sont notamment les suivants : réduction des obstacles linguistiques qui risquent d'entraîner des soins inappropriés, en particulier pour les résidents atteints de démence; moins de risque de racisme ou de traitement dégradant; et une meilleure conservation de l'identité et des rôles traditionnels.

Lorsqu'il n'y a pas d'établissement de soins de longue durée dans la réserve, beaucoup font le parallèle avec le système des pensionnats que ces mêmes personnes ont subi dans leur enfance. Les administrateurs de programme expliquent qu'ils préféreraient avoir des fonds pour un projet d'investissement tel que la construction d'un établissement de soins de longue durée ou d'une résidence pour aînés dans la collectivité afin de préserver davantage le bien-être de la personne.

Intégration et chevauchement avec le Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits

Constatation 4. Le Programme d’aide à la vie autonome et le PSDMCPNI fonctionnent le long d’un continuum. Les distinctions entre les services sont généralement claires, mais le financement séparé des programmes à SAC est peu pratique et présente un intérêt limité.

Le Programme d'aide à la vie autonome a toujours été conçu comme un programme de soutien du revenu devant permettre à des personnes à faible revenu ou sans revenu de recevoir des services. Aujourd'hui, en pratique, il s'agit plus d'un programme de santé en ce sens que les soutiens sociaux et en matière de santé sont souvent intégrés dans les collectivités des Premières Nations. La conception originale du Programme d'aide à la vie autonome est raisonnable en théorie, mais il n'a pas suivi l'évolution des réalités en ce qui concerne les besoins sanitaires et sociaux des Autochtones qui vivent dans les réserves, ni l'évolution de ces types de services en dehors des réserves.

D'après l'évaluation du PSDMCPNI de 2013, dans les collectivités où les deux programmes étaient officiellement intégrés, leur exécution était plus efficace en raison d'une meilleure coordination, de meilleures évaluations et d'une meilleure gestion des cas, et parce qu'elles disposaient de plus de fonds stratégiques pour répondre aux besoins et former le personnel. L'intégration des deux programmes au niveau communautaire permettait aussi d'avoir un nombre d'heures de service fournies plus approprié et une meilleure adaptation aux besoins des clients. 

Dans toutes les collectivités, les administrateurs de l'aide à la vie autonome déclarent disposer de réseaux informels solides dans la collectivité pour repérer les aînés et autres adultes qui peuvent avoir besoin de services. Dans certaines collectivités, il s'y ajoute une solide coordination des soins de santé communautaires, en particulier avec le PSDMCPNI . Ces réseaux aident les administrateurs à bien évaluer les nouveaux clients. Toutes les collectivités déclarent être en mesure d'évaluer un nouveau client dans un délai maximum de 72 heures et, souvent, en moins de 24 heures en cas de besoins importants. Les collectivités font savoir que lorsque les programmes sont gérés séparément, les travailleurs à domicile du Programme d'aide à la vie autonome et du PSDMCPNI et leurs administrateurs respectifs dans la collectivité communiquent régulièrement afin de vérifier si des évaluations ont été recommandées pour des personnes dont ils ont remarqué qu'elles auraient besoin de services à domicile qu'un programme ou l'autre ne peut pas fournir.

Le degré d'intégration de l'exécution du Programme d'aide à la vie autonome et du PSDMCPNI dépend généralement des capacités administratives d'une collectivité donnée. En général, les collectivités dont les capacités sont moindres regroupent le financement des deux programmes afin de fournir le continuum de services dont un client donné peut avoir besoin. Les administrateurs de l'aide à la vie autonome expliquent que, quand vient le moment de présenter des rapports, on rend compte des services aussi précisément que possible, mais la distinction est un peu arbitraire, étant donné le nombre de clients qui reçoivent les deux types de service. Dans les collectivités qui ont plus de capacités, la séparation du financement et de l'exécution des programmes est moins problématique. Dans certains cas, le salaire du personnel est payé séparément par programme et la bande dispose de deux programmes logiciels distincts pour gérer la comptabilité. 

D'après l'enquête menée en 2018 pour l'évaluation du PSDMCPNI , les répondants (infirmières et administrateurs de services de soins de longue durée) ontariens (39 %) et manitobains (53 %) sont les moins susceptibles de faire état d'une certaine collaboration ou d'une grande collaboration entre le PSDMCPNI et le Programme d'aide à la vie autonome, en comparaison d'autres régions (Atlantique – 100 %; Québec – 93 %; Alberta – 69 %). Les répondants qui font état d'une telle collaboration parlent principalement d'aiguillages, de gestion commune de cas, d'échanges d'information et de planification commune. Dans certains cas, les répondants expliquent que les deux programmes sont gérés et exécutés conjointement par le même personnel.

Bien que la répartition des responsabilités du Programme d'aide à la vie autonome et du PSDMCPNI soit claire pour presque tous les administrateurs de l'aide à la vie autonome, plusieurs se demandent si la séparation des deux programmes du point de vue du financement est le moyen le plus efficace d'atteindre les objectifs des deux. Indépendamment de la capacité d'une collectivité donnée de gérer le financement des deux programmes, les administrateurs des Premières Nations et les employés de SAC déclarent à la quasi-unanimité que la plupart des clients qui bénéficient d'un des programmes reçoivent aussi des services de l'autre et soulignent le concept important de continuum des soins dont il est beaucoup question dans les études.

Indépendamment de leurs approches respectives de l'exécution des deux programmes, tous les répondants estiment qu'on devrait élargir les activités admissibles au financement de l'aide à la vie autonome ou assouplir la formule de financement pour tenir compte de la situation particulière de chaque collectivité. Il ressort de l'enquête menée pour l'évaluation du PSDMCPNI que beaucoup de répondants souhaitent une approche centralisée, simplifiée ou officiellement intégrée des deux programmes. Certains administrateurs dont le financement est fixe estiment qu'ils pourraient mieux exécuter le programme avec un financement global.

Les collectivités sont d'avis que la conception actuelle des deux programmes n'est pas aussi efficace qu'elle le pourrait. Une approche intégrée du Programme d'aide à la vie autonome et du PSDMCPNI leur permettrait de mieux utiliser les fonds pour couvrir le continuum de soutiens dont leurs membres ont besoin. Toutes les collectivités souhaitent avoir la souplesse nécessaire pour apporter des réponses homogènes aux besoins en soins personnels.

Ces constatations sur l'aide à la vie autonome et les soins à domicile et communautaires, et sur le continuum de soins dans les Premières Nations en général, ne sont pas nouvelles. En 2009, l'Évaluation des programmes d'aide au revenu, de réinvestissement de la Prestation nationale pour enfants et d'aide à la vie autonome recommandait trois mesures sur le sujet :

  • « La gestion du programme devrait considérer séparer le financement pour l'aide à la vie autonome  à domicile et élaborer une méthodologie de financement pour chaque composante du programme. L'intégration de l'aide à la vie autonome  à domicile avec le Programme de soins à domicile et en milieu communautaire avancerait l'accomplissement de cet objectif;
  • La gestion du programme, de concert avec Santé Canada, devrait envisager l'intégration officielle des soins à domicile et du soutien communautaire du programme d'aide à la vie autonome  et des soins à domicile et en milieu communautaire; et
  • La gestion du programme, de concert avec Santé Canada, devrait envisager de faire un essai mixte de modèles intégrés d'accès unique aux soins continus dans les régions partout au pays, et à partir du résultat de ces essais, élaborer une stratégie à long terme pour l'intégration des services et l'accès à ceux-ci. »

De nouveau en 2013, la dernière évaluation du PSDMCPNI recommandait ceci :

« Santé Canada devrait poursuivre ses négociations avec Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (AADNC) pour achever l'intégration officielle du PSDMCPNI au volet de soins à domicile du Programme d'aide à la vie autonome d'AADNC afin d'améliorer les gains d'efficacité en matière de prestation de services de soins à domicile. »

Il se peut que ces recommandations n'aient jamais été mises en œuvre parce que les programmes étaient financés par deux ministères fédéraux distincts. Aujourd'hui, il est possible de revoir la faisabilité de l'intégration des deux programmes, qui relèvent désormais de SAC. La lettre ministérielle de mandat remise par le premier ministre Justin Trudeau mettait l'accent sur un changement systémique, notamment en ce qui concerne la prestation des services de santé aux Autochtones. Elle invitait à travailler en étroite collaboration avec d'autres ministères fédéraux afin de donner la priorité à une prestation de services communautaire axée sur les patients et de redonner aux collectivités autochtones le contrôle et la compétence.

5.3 Compétence et communication

Lorsqu'on les interroge sur la répartition des responsabilités entre le gouvernement fédéral et les collectivités des Premières Nations en ce qui concerne le Programme d'aide à la vie autonome, les administrateurs de programme répondent à l'unanimité qu'ils comprennent le rôle de bailleur de fonds de SAC et celui d'administratrices du programme des Premières Nations. Bien que les responsabilités de haut niveau soient claires, les connaissances et la communication sont fragmentées sur le plan pratique. Au cours de la recherche effectuée pour cette évaluation, plusieurs problèmes de compétence ont été soulevés, pour beaucoup dus à des renseignements erronés. Beaucoup estiment que l'information est mal interprétée ou mal communiquée à cause d'un manque de communication entre le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les administrations des Premières Nations. 

Un certain nombre de coordinateurs de services d'aide à la vie autonome font état d'une dégradation de la confiance tenant à un manque de communication avec les bureaux régionaux de SAC sur le mode de calcul des niveaux de financement de ces services et d'attribution des fonds aux administrations des Premières Nations. Cette confiance fragilisée est mentionnée comme étant un obstacle majeur au renforcement des relations de nation à nation. D'autres collectivités expriment une exaspération au sujet de ce qui est perçu comme un manque de transparence dans la prise des décisions de financement. Il se peut que le roulement de personnel important à l'administration centrale de SAC, dans les bureaux régionaux et dans les collectivités des Premières Nations soit à l'origine de ces préoccupations, car il entraîne une perte de connaissances ministérielles.

L'instrument de collecte des données des bénéficiaires du Programme d'aide à la vie autonome est une source évidente de malentendus avec les bureaux régionaux. Il a souvent changé au cours des dernières années afin de réduire le fardeau en matière de rapports, ce qui était bien intentionné. Cependant, les administrateurs de programme des Premières Nations et le personnel de SAC mentionnent que beaucoup de collectivités continuent d'utiliser d'anciennes versions, probablement à cause d'un manque de communication entre les bureaux régionaux et le personnel des bandes. Il en découle un risque de transmission de données inexactes à SAC ou de doubles efforts pour les administrateurs des Premières Nations à qui on demande de soumettre de nouveau l'information sur le bon formulaire. L'instrument de collecte de données pour l'exercice 2018-2019 donne la possibilité aux administrateurs de programme de signaler le nombre de besoins non satisfaits ou d'heures évaluées qui ne sont pas fournies. Jusqu'à cette révision, les instruments de collecte des données ne permettaient pas aux administrateurs de programme de mentionner les services qu'ils étaient incapables de fournir, ce qui conduisait à une surévaluation des résultats obtenus.

Certaines collectivités signalent des problèmes de coordination avec les organismes provinciaux pour le placement d'aînés dans des établissements situés en dehors des réserves. SAC exige que les représentants des autorités provinciales ou régionales de la santé fassent une évaluation en vue de soins en établissement, afin de s'assurer que les personnes placées dans les établissements répondent aux mêmes critères d'admissibilité que celles qui vivent en dehors des réserves. Dans certains cas, les participants à cette évaluation pensent que les travailleurs de la santé provinciaux ou régionaux ne savent apparemment pas que les soins de type I et de type II restent payés par le palier fédéral, même si les services sont assurés dans un établissement provincial. De même, les administrateurs des Premières Nations sont d'avis que les travailleurs provinciaux ou régionaux estiment que ce n'est pas à eux d'évaluer un client fédéral en vue d'un placement dans un établissement privé.

Dans une région, les administrateurs de l'aide à la vie autonome soulignent que le processus de placement d'un client dans un établissement provincial peut varier et qu'il dépend de la relation que la Première Nation a nouée avec le représentant de l'autorité régionale de la santé avec qui elle est en contact. Toutefois, ce problème n'a pas été signalé pendant la visite sur place en Saskatchewan, où SAC et la province redoublent d'efforts depuis quelques années pour mettre en place des processus pour la continuité des soins et le transfert d'une compétence à l'autre. Dans les régions où le bureau régional et les collectivités entretiennent des relations solides, la communication est fréquente, quoiqu'informelle.

Il y a également des problèmes de communication en ce qui a trait aux dépenses admissibles, ce qui amène à penser que les bureaux régionaux de SAC contrôlent strictement ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas, alors qu'en fait, il s'agit peut-être d'une question de ressources disponibles et pas d'une politique. Par exemple, les transports à des fins non médicales (p. ex. pour faire des courses), la formation du personnel et le soutien pour des activités sociales pour les aînés sont des éléments que, souvent, les administrations des Premières Nations ne croient pas autorisés par SAC. Lorsqu'on le leur mentionne, les employés régionaux déclarent ne pas comprendre pourquoi les administrateurs croient que ces dépenses ne sont pas admissibles et ils suggèrent que cela tient peut-être à des questions de limites de ressources.

 

 

6. Conclusions et recommandations

Le Programme d'aide à la vie autonome est apprécié pour le niveau de service et de soins fourni et parce qu'il contribue à l'autonomie des personnes chez elles et dans leur collectivité. Cependant, on n'accorde pas aux Premières Nations l'autonomie ou la latitude nécessaire pour fournir un continuum de soins et de services qui correspondent mieux aux besoins et aux circonstances. Plusieurs aspects pourraient faire l'objet de recommandations découlant de l'évaluation, mais au fond, la première étape consiste à changer l'approche du Programme d'aide à la vie autonome pour qu'elle favorise l'autodétermination des collectivités et permette un continuum de soins.

Par conséquent, il est recommandé que SAC :

  1. Propose, lorsque les collectivités le souhaitent, des options de financement plus souples qui couvrent la gamme de services actuellement offerts dans le cadre du Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits et du Programme d'aide à la vie autonome, y compris en travaillant en collaboration avec les collectivités qui veulent passer de formules de financement fixes à souples afin de mieux gérer les services à long terme.
  2. Mette à jour, à brève échéance, les directives de programme afin de préciser quels services peuvent bénéficier d'un financement, ensuite crée et mette en œuvre un plan de communication afin de faire part de ces directives révisées aux administrateurs autochtones du Programme d'aide à la vie autonome dans toutes les régions.
  3. Définisse une stratégie pour mesurer la demande de services actuelle et éventuelle par rapport à la capacité de les fournir, afin de mieux éclairer les orientations des politiques relativement à l'ampleur des besoins et à la couverture de différents types de services.
 

 

Appendice A : Matrice d’évaluation

Point d'évaluation Questions d'évaluation Indicateur (du Profil de l'information sur le rendement 2017-2018), s'il y a lieu
Résultats escomptés Dans quelle mesure le soutien offert à domicile et dans les foyers de groupe, les soins en établissement et autres initiatives connexes répondent-ils aux besoins des personnes à faible revenu dans le besoin qui résident normalement dans une réserve? Pourcentage de résidents à faible revenu d'une réserve qui perçoivent une lacune sur le plan de leur accès aux services de soutien social.
Pourcentage de clients de soins en établissement dans les établissements hors réserve.
Pourcentage de communautés des Premières Nations qui disposent dans la réserve d'un centre de soins en établissement agréé.
Personnes déclarant devoir quitter leur collectivité pour recevoir du soutien pour leur handicap.
Dans quelle mesure ce soutien est-il accessible aux personnes admissibles? Pourcentage de cas où un résident d'une réserve a été évalué pour l'obtention de services dans le cadre du Programme d'aide à la vie autonome et a obtenu ces services.
Nombre de bénéficiaires déclarant « aucun service fourni » ou « service alternatif fourni ».
Modification du ratio de clients de soins en établissement et de clients de soins à domicile rajusté en fonction des changements démographiques.
Dans quelle mesure les administrations des Premières Nations et autres organismes d'exécution de programme ont-ils la capacité de gérer le programme et la capacité d'offrir les services aux personnes admissibles en vertu du Programme d'aide à la vie autonome? Cote moyenne des examens de la conformité axés sur le risque.
Pourcentage de bénéficiaires qui présentent des instruments de collecte de données complets, exempts d'erreurs et à temps.
Efficience Le niveau actuel de financement et l'approche pour le Programme d'aide à la vie autonome dans les réserves sont-ils viables à long terme?  
Quelles approches du Programme d'aide à la vie autonome pourraient éventuellement permettre d'atteindre les meilleurs résultats individuels qui soient relativement à la contribution financière?  
Dans quelle mesure existe-t-il un chevauchement ou une complémentarité entre les programmes de soutien social dans les réserves de SAC et de Santé Canada?  
Rôles et responsabilités Les activités actuelles relatives à la prestation du soutien du Programme d'aide à la vie autonome sont-elles harmonisées aux objectifs stratégiques ministériels et aux priorités gouvernementales?  
Les responsabilités et les rôles respectifs de SAC (administration centrale et régions), de Santé Canada, des gouvernements provinciaux, des administrations des Premières Nations et d'autres agents administratifs sont-ils efficaces et clairs?  
Conception du programme Les politiques et les réglementations actuelles sur les programmes, y compris celles sur la comparabilité des provinces, sont-elles appropriées et efficaces en ce qui concerne les résultats attendus?  
La politique sur les programmes et la conception de ces derniers facilitent-elles suffisamment la réalisation d'une comparabilité provinciale?  
Les résultats énoncés sont-ils appropriés et pertinents?  
Peut-on s'attendre à ce que l'approche actuelle de SAC pour le Programme d'aide à la vie autonome atteigne les résultats énoncés?  
L'approche de SAC dans le cadre du Programme d'aide à la vie autonome contribue-t-elle à l'avancement de la réconciliation entre le gouvernement du Canada et les peuples autochtones?  
 
 

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